REPRESENTATION DU PARANORMAL ET DE LA TELEPATHIE DANS LE CHAMP PSYCHANALYTIQUE (suite)

Marie-Christine Combourieu – 1985

 

b/ Réflexions sur la catégorisation

Il faut dire dès à présent que nous nous attendions à trouver une certaine homogénéité dans les réponses et la façon de se représenter le "paranormal" chez les analystes d'une même formation. Les explications théoriques qu'ils avancent - ou les systèmes de représentations - au sein de la même École, divergent. Les points de vue sont pluriels, personnels, ce qui nous amène à citer (A4,16) :  "Je pense que c'est une questiion de structure personnelle plutôt qu'analyste ou pas analyste. Tous les analystes ne fonctionnent pas pareil, vous le verrez. Nous n'avons pas le même contact à la réalité ni à ces phénomènes-là, donc pas la même disposition à accepter leur potentialité d'existence ou pas.


Si les analystes étaient des gens aussi bien policés par leur formation, leur pratique, il n'y aurait pas autant de sociétés psychanalytiques dissidentes ! Il n'y en aurait pas quatre en France qui se tirent dans les pattes. Et, au sein d'une même Société, il n'y aurait pas autant de diffi­cultés à se comprendre".

Cela nous conduit à penser que les critères d’habilitation dans telle ou telle Ecole ne sont pas codifiés en fonction de la doctrine de référence "stricto sensu".

Nous avons évoqué plus haut les "changements de voies" et les cursus plutôt mouvants (E1), qui ne sont pas rares, semble-t-il (E2,26).

Toutefois (E2,25) dit : "On constate la façon dont fonctionnent les groupes. De façon très théorique et didactique. ll y a un terrorisme des groupes".

Plus loin, elle dit aussi : "Il faut pouvoir travailler avec des gens qui se consacrent, en dehors, à une recherche personnelle. Et c'est assez rare. Le temps manque. En fait, ça donne des gens qui sont très dépendants de l'Institution.( ... ) Dans les groupes d'analystes, il y a une façon de fonctionner qui fait qu'il y a toujours (et qu'il y a toujours eu) soit une disposition de salle, soit une façon de parler aux autres... qui fait qu'il y a toujours un "maître" qui parle. Mai s Freud, en fait, était comme ça" (E2,26). Nous savons que c'était le cas aussi de J.Lacan.

Faut-il considérer qu'il y a là une contradiction ? Nous pensons que les analystes interviewés sont en général plutôt discrets lorsqu'on leur demane de parler de leur formation/groupe/Ecole.

Toutefois, à l'intérieur d'une même "institution", il semble que la com­munication ne soit pas toujours facile : "peut-être qu'on ne se parle pas beaucoup", dit encore (E2,23).

Bien évidemment, le contrepoint théorique le plus important se situe entre les Ecoles freudo-lacaniennes et les Ecoles jungiennes, quant au mode de sensibilisation, puis d'intégration des phénomènes dits paranormaux, dans la manière de les percevoir et de (se) les représenter. Les appa­reils conceptuels et terminologiques diffèrent.

Les Jungiens disposent, par exemple, du concept de "synchronicité" pour objectiver certaines occurrences ou  "coïncidences signifiantes" - pour eux - que les autres formations théorisent différemment, notamment par le biais du mot "hasard" (Ecoles freudo-lacaniennes).

Des expériences dites paranormales se trouvent dans toutes les forma­ions, mais théorisées différemment.

De même, l'implication personnelle du psychanalyste ou du psychothéra­peute interviewé diffère : Des expériences dites paranormales peuvent avoir été vécues personnellement, rapportées par des patients, par des amis...

Les représentants de l'École lacanienne, malgré ses dissidences internes, présentent une certaine unité face au "paranormal", sauf (B2), cependant.

1°/ La Société Psychanalytique de Paris (L'Institut)

C'est peut-être la formation où ce que nous disions à propos du contraste des positions théoriques divergentes à l'intérieur d'une même Ecole, est le pus repérable dans notre échantillonnage.

_(A2,2) et (A3,10) par exemple, sont en désaccord sur la validité du concept freudien de "communication d'inconscient à inconscient", qui expliquerait la "transmission de pensée" et/ou la télépathie. Or, (A3,10-13) fait référence à plusieurs textes de Freud où ce concept est évoqué.

_De même (A1 , 17) et (A2, 9 ) se disent "matérialistes" et "athée", alors que (A3, 5, 29) et (A4, 13) affichent des positions moins catégoriques, sans se déclarer pour autant "croyantes" et/ou "religieuses" ni "mystiques" : certainement pas. Toutefois, nous relevons des expressions comme : "gratis pro Peo" (A3,5) et : "Je m'intéresse beaucoup aux problèmes mystiques. Très souvent, j’ai fait des analogies - pas des parallélismes - entre l'ex­périence analytique et l'expérience mystique.(...) C'est vrai qu'il y a un moment d'élévation - pas de lévitation ! – qui fait que, lorsqu’on est très, très content de ce qui s'est passé dans une séance d'analyse ou dans une relation humaine, tout simplement, après coup, on peut dire . "Il y avait Dieu là-dedans". C'est une lecture "après coup""(A4, 13).

Nous pensons que (A1,17) et (A2,9) expriment volontairement d’une manière orthodoxe, la doctrine freudienne (voir p. 23 ).

_(A 1, 19) et (A2, 18) déplacent le problème du "paranormal" dans d' autres cultures.

_(A3,5,29) et (A4,13 ... ) sont des femmes : Devons-nous considérer ce paramètre comme signifiant ? Dans la théorie freudienne, sans doute l’est-il (le point de vue de (E2, 18-19) : "Freud avait procédé par déni (. . .) . Ca lui a permis de théoriser mais au prix de ce clivage. Et au prix de tout ce qu'il a repoussé. (... ) Ca, je trouve que c'est le problème des hommes et des femmes ... les hommes théorisent à partir des émotions repoussées - je trouve. Ils théorisent aussi à partir des émotions des femmes, ça me semble évident !", nous semble intéressant à ce propos) .

2°/ Les Ecoles lacaniennes (série B)

Inversement à la précédente, le morcellement apparent des différents groupes ne contredit pas une

certaine unité de doctrine, voire même d'attitudes vis-à-vis du "paranormal" en général.

Conformément à la doctrine de J.Lacan, tout passe par le langage et le rapport que le sujet entretient avec lui et "l' ordre symbolique" (B1,3-4/ B3,13 / B4,8,11).

Dès lors, quelle place est laissée à l'extra-verbal, souvent considéré comme la matrice des phénomènes dits paranormaux (B1,3,14-15 à propos de l' enfant mutique; B1,7 / B4,1 à propos de la "fusion avec le non-dit de l'autre" - qu' elle ne considère pas comme paranormal cependant) ?

_(B2) se démarque des trois analystes précédents bien qu' elle ait appartenu à l' École Freudienne de Paris (E. F. P.) ; elle est restée sans adhésion depuis la mort de J.Lacan mais semble s' orienter vers la théorie Kleinienne (B2,3,19). Elle paraït moins "lacanienne" que (B1 /B3 /B4).  Nous pouvons peut-être parler dans son cas aussi de "changement de voie".

3°/ L'entretien C (Société Française de Psychanalyse, tendance W. Granoff).

Il s'agit d'un entretien pour ainsi dire non-directif. Son intérêt réside dans l'évolution hîstorique des idées qui nous est présentée (C,21...).

4°/ L'entretien D

La formation d'origine de cette psychanalyste est psychiatre. Elle dit avoir appartenu à une génération "proche de celle de Freud" mais n'avoir cependant pas intégré l’Institut (D,1).

Elle s'est specialisée, à la suite d'une sensibilisation personnelle à divers phénomènes dits paranormaux (rêves télépathiques) , dans la parapsychologie et dans l'analyse des sujets "psi” : “ça fait maintenant un recul de... onze ans... De pratique Psychanalytique presque exclusivement avec des sujets "psi". Parce que vous n'êtes pas sûre de pouvoir vous occuper de personnes ayant ces capacités particulières (qui posent en elles-mêmes souvent des problèmes psychologiques spéciaux," dit (D 7) .

Cet entretien ittustre, à partir d'expériences personnelles et/ou impersonnelles, diverses catégories de phénomènes dits paranormaux (rêves précognitifs, télépathie, transfert de pensée... ) et peut être considéré comme un support théorique - en partie - de notre recherche. (D,1-5,18-21).

5 °/ Les entretiens E1 et E2

Nous avons regroupé ici, deux entretiens d'analystes appartenant au Collège de Psychanalyse qui nous sembte moins une Ecole qu'un lieu de recherches et une Sociéte regroupant des analystes de toutes tendances ou de formations polyvalentes.

_C'est le cas notamment de (E1), analyste ayant d'abord appartenu à la Société Française de Psychanalyse (membre titulaire), puis à l'École Freudienne de Paris (analyste de cette Ecole). Il appartient maintenant, parallèlement, au Centre de Formation et de Recherche Psychanalytique.

Nous voyons là un exemple particulièrement frappant de mouvance dans le cursus personnel, théorique et déontique (E1, 1).

D'autre part, cet analyste nous semble "marginal" dans le sens où, ayant appartenu à plusieurs formations, il reste foncièrement original dans ses positions. Pour lui, il raisonne en termes d'"épistémologie" (E1,3-9,13-14, 24). Il cherche de nouvelles voies (E1,24-26,33-36).

_(E2, 9, 20. . . ) dénote, elle aussi, la même originalité. Elle a donc quitté IV° Groupe, dit s'intéresser à l’astrologie : "Je me suis aperçue depuis je m'entendais bien avec ces gens là. Il y a beaucoup d'analystes qui se  posent "(toutes ces questions qu'on est en train de se poser sur le paranormal (E2;24-25). Elle exprime une curiosité pour les travaux jungiens : "J'ai connu des analystes qui avaient pris peur de la fantaisie. Ils n'ont pas du tout exploité ce qui est mystérieux. Moi, je ne connais pas les Jungiens. Mais à ce que j'en entends par des amis... Ce ne sont pas des amis délirants, ce sont des amis qui ont pratiqué plusieurs thérapies : Lacanienne, freudienne... et qui maintenant se tournent vers les Jungiens. Les Jungiens et les astrologues. J'ai l'impression qu'il y a un va-et-vient entre les deux cheminements (... ). lls sont plus tolérants par rapport à la souffrance, je crois. C'est toujours ça qui revient" (E2,25). Elle dit d'autres Groupes:" (. . .) On ne supporte pas du tout l'ouverture à des phénomènes un petit peu étranges! Ca ferme la porte à l"'inquiétante étrangeté" (E2, 27) .

_(E1, 14-15), lui aussi, s'intéressait à l'astrologie : "Je suis assez près des faits pour voir, quand même! Quand vous prenez une consultation chez  astrologue.. . Moi, ça m'est arrivé plusieurs fois, justement, pour me mettre au contact des choses ... Il y a quelque chose qui ne peut pas être dénié. Ce n' est pas possible.'.'.

De même, il s'intéressait à la recherche jungienne, disant à propos de Jung : "J'en pense du bien. Comme je peux penser le plus grand bien des gens qui s' intéressent aux images , à la mythologie" (E1,22).

_(E2,9), pour en revenir à elle, travaille également dans des voies assez nouvelles, tentant de théoriser les "clivages appartenant aux générations antérieures". Pour elle, c'est la voie pertinente à suivre pour une recherche sur les phénomènes dits paranormaux, en analyse ou en dehors : "Moi, je pense que la parapsychologie est située, déjà (dans la Psychanalyse). Mais ça ne s'appelle pas comme ça. Elle est située sous la forme des incorporations et des fantômes... La théorisation d'Abraham et de Maria Torok est assez.. . fait penser à ça. Le cryptotome.. . On pourrait trouver des empreintes extrêmement archaïques, aussi, au niveau de l'attachement" (E2,28).

_(E1 et E2) semblent se démarquer d'orientations institutionnelles strictes. Leurs démarches paraisent élargir le champ des recherches dans le domaine de la Psychanalyse par des explorations diverses, originales et nouvelles ; ils recourent aussi, parfois, à d'autres théorisations moins connues.

_(E1) appartient, nous l'avons dit, au Centre de Formation et de Recherche Psychanalytique.

6°/ Les Ecoles jungiennes (série F)

Nous employons le pluriel à dessein parce qu'il ressort de notre échantillonnage que (F1) est affilié directement à l'Association Interna­tionale de Psychologie-Analytique (AIPA) de Zurich : Il critique assez violemment, par contre, l'Association Française de Psychologie-Analytique (F1,4).

_Excepté cette scission apparente, des entretiens (F1 et F2) sont très similaires du point de vue des expériences dites paranormales vécues à titre personnel et/ou impersonnel, et de la théorisation qui nous en est donnée.

_(F2) appartient au Groupe jungien de Paris. Il est enseignant dans cette formation ; il nous a lu plusieurs extraits de la Correspondance de Jung (F2,7- 10,14).

En revanche, (F3), analyste didacticienne du Groupe jungien de Paris surprend par l'absence de sensibilisation personnelle et par le désintérêt qu'elle affiche pour cette problématique du "paranormal", en général (F3,2,15). Toutefois, elle dit : "Si quelqu' un venait parce qu'il est sujet à des

phénomènes paranormaux (. . .) , je tâcherais de comprendre"      (F3, 16)

Nous nous demandons si cette attitude n'est pas cause du départ d'une de ses patientes venue la voir une première fois : "J'ai vu une fois quelqu' un : Je n'ai jamais très bien compris, d' ailleurs, les raisons de sa démarche. Elle est venue une fois. Cette personne qui est venue me voir me disait qu'elle vivait "des phénomènes de synchronicîté"" (F3,2).

Ou alors est-ce par un entendement presque naturel de ces phénomènes ? En effet, elle ajoute : "Une fois, c'est tout. Je ne pense pas qu' elle ait eu des raisons de faire une psychanalyse. Elle était très bien avec tout ça et partout... Ca ne demandait même pas d'explication (s )" (F2,3).

Ce qui nous a le plus frappée de sa part ce sont les positions théoriques qu'elle avance concernant la personne de Jung qui n'était, selon elle, pas mystique : "Il n'était pas mystique. C'est une erreur ! Jung mystique ? Ah! Nonl Ca, alors! ( . . . ) On l'accuse d'être mystique. C'est faux! Ce qu'il écrit. . . Si on le lit.. . Si on le lit vraiment (. . . ). Ce n'est pas un mystique. Absolument pas ! " (F3,12-13).

De même, en réponse à notre question sur les idées matérialistes ou spi­ritualistes de Jung, elle devint agressive et engagea un réquisitoire contre l'opinion publique donnant de Jung de fausses interprétations, faisant de lui "un paillasson"" : Ce n'est pas un spiritualiste! (. . .Vous voyez comme vous faites ! Vous me dites : "Ah! C'est un spiritualiste ou c'est un matérialiste" ! non, justement ! ( ... ) Il passe pour tout ce qu'on voudra. Tout ce qu'on voudra ! C’est extraordinaire ! C'est un véritable paillasson. Tout ce qu'on dit de Jung… Mais c'est faux !!!" (F3,14).

Ailleurs, elle disait de Jung : "Ce n'est pas un alchimiste. Mais non ! Il s'est intéressé à l'alchimie. Pour lui, l'alchimie a été une façon de réunir dans la suite des religions (si l'on peut dire) les Gnostiques et la Psychologie des Profondeurs. Mais c'est tout !" (F3, 13). Et elle rajoute "Ce n'est même pas un  "Jungien" (... ) Il n'y a pas l'ombre d'une partie mystique”. La théorisation de la "synchronicité" est toutefois présente, notamment à l'occasion d'un épisode personnel ; elle ne le considère pas cependant comme "paranormal" : "On se marie avec son problème. Est-ce qu'on peut appeler ça télépathie ? Je n'en sais rien. Je n'ai pas de définition de la télépathie (F3,5).(. . . ) Je me rappellerai toujours d'un cas( ... ). Je rentre de vacances. C'est mon premier patient qui me raconte... Enfin, exactement... Mais alors !(. . .) Il m' a semblé qu'il racontait ce que j'avais raconté moi-même quelques jours auparavant... C'était très évident dans ses paroles" (F3,7). Cet entretien contraste, donc, avec les deux autres. La problématique que nous soulevions lui semblait de la théorie pure - ce qui l' irritait - alors que son souci unique, disait-elle, était de "soigner", c'est tout. (F3, 17-17).

_(F4) n'est pas un entretien mais la transcription d'une émission radiophonique sur "Les savoirs censurés". Une analogie est établie entre ce qui se passe "au niveau de l'individu, c'est-à-dire du psychisme individuel, et ce qui se passe au niveau des grands phénomènes culturels collectifs", par rapport à la censure (F4,2). Dans notre "civilisation de l'avoir", les savoirs censurés sont "des formes de la vie psychique qui témoignent d'autres réalités que celles dominantes et mieux, ou brouillent ou doublent les lois fondamentales de l'ordonnance rationnelle : La loi de causalité, l'ordre du temps, l'unité de la personne. . . "(F4,4) .

Ces "savoirs censurés" forment l'arrière-fond culturel constitué par les "savoirs traditionnels" - au sens propre de ce terme - comme les mythes, les croyances ataviques en l'astrologie, les savoirs ésotériques (l'alchimie, le Yi-King en Orient, etc.. . ), (F4,6-8) . Ils sont en recrudescence actuellement.

7°/ L'entretien G (ex-Ecole jungienne de Paris)

Cet analyste, physicien et enseignant à l'Université, a quitté l'Ecole jungienne où il a fait son analyse didactique.

Nous pouvons nous demander si son départ de cette formation ne coïncide pas avec son entrée dans l'Université, qu'il préfère.

Il n'est pas très sensibilisé par la problématique du "paranormal", en général, et n'exprime pas une confiance réelle dans les découvertes éven­tuelles de la science dans ce domaine.

Nous nous demandons également si une incompatibilité n'existe pas entre les recherches et l'esprit scientifique universitaires et l'intért porté à la parapsychologie. En effet,voici ce que dit (I, 19-20) : "Il  faut distinguer ce qui est publié de ce qui est dit. C'est vrai pour les pscycha­nalystes et les physiciens. Ils ont des positions "rationalistes", au mauvais sens du terme. Les psychologues aussi. Leur position en privé est très différente de celle qu'ils affichent en/au public. C'est-à-dire qu'en privé ils accepteront assez facilement de considérer des faits dans leur intrprétatlon parapsychologique. Dans leur vie professionnelle de scientifiques reconnus, dans leurs publications, ils éviteront tout à fait d'aborder ces sujets, indiquant que ce serait dangereux pour leur avenir, leur carrière ! Les physiciens comme Costa de Beauregard n'hésitent pas à parler de parapsychologie. Mais il est "massacré” par ses confrères."

_(C, 14) tient à peu près le même propos.

_(G, 6) évoque l'ouverture que représente l'Université par rapport aux " formations initiatiques" des Ecoles psychanalytiques. "Essentiellement, Université est un lieu. L' Université, c'est un endroit où il y a les Jun­giens, les Freudiens, des gens de l'Ecole de Lacan etc... Et puis les étu­diants écoutent l'un, écoutent l'autre, et puis deviennent eux-mêmes à partir de là".

Il retrace les débuts de la Physique : "Il y avait des cabinets de physique (des Rose-Croix, dans le temps) qui, dans leur coin, avec des forma­tions très initiatiques - souvent secrètes - faisaient des choses...

Et à partir du moment où c'est arrivé à l'Université, ils étaient tous là et ça a démarré : C'est devenu la physique" (G,6).

Pour sa part, il n'aimerait pas participer à des expériences de recher­ches sur la "transmission de pensée" . "Ca ne m'intéresse pas, à vrai dire. Non pas que ça ne m'intéresserait pas en soi. Mais il y a tellement de choses qui... ( m' intéressent.). Je ne vais pas, en plus, m'intéresser à ce qui... Ce qui peut être intéressant, c'est de s'informer des expérimentations" (G, 18-19).

Il s'est en effet montré très curieux et intéressé par les résultas éventuels des expériences soviétiques dans ce domaine (G,1-2,9).

Pour lui, la question est de se donner une conceptualisation, des moyens d'appréhender le phénomène de la télépathie, par exemple : "Outils, pas seulement théoriques, hein ! Quand on cherche des preuves, la conceptua­lisation n'intervient pas seule. Il y a aussi une conceptualisation qui doit fournir un outillage qui va permettre de mettre en oeuvre. Alors, cet outillage, on ne l'a peut-être pas, à l'heure actuelle, pour étudier un peu sérieusement les phénomènes paranormaux ?"(G, 8) .

Il nous semble d'un parti-pris rationaliste mais toutefois curieux des recherches en cours.

8°/ Les entretiens H1 et H2 (inspiration reichienne)

Là encore, la catégorisation ne coïncide pas avec une unité de doctrine. Pour plusieurs raisons : Seul (H1) appartient à l'Institut W. Reich en tant que membre associé; (H2) a seulement effectué son analyse didactique dans ce groupe.

_(H1 et H2) connaissent tous deux Gérard Guash (H1,24), co-fondateur de cette Société , que nous n'avons pu interviewer parce qu'il avait été retenu au Mexique.

_(H1,2) n'applique cependant pas à la lettre la doctrine reichienne qu'il ne "reconnaît pas" à part entière - de même qu'il ne reconnaît entièrement aucune théorie, vraiment, mais s'intéresse à divers courants (H1, 1-3); il dit rechercher "les structures les plus souples possibles et les moins repérées comme structures de soi. Tout cela pour dire que, dans un domaine précis, je m'intéresse à plusieurs approches . Et même aux guérisseurs philippins".

_(H2, 1-4) fait preuve d'une curiosité et d'une diversité similaires, si elles ne vont pas dans le même sens : Il a opté pour la Bio-Energie et, à l'intérieur de cette pratique, pour le courant de J. Fliss - pas celui de Lowen, plus connu.

Il est par ailleurs chercheur à l' I.N.S. A. et attaché à l' E.N.S.

Il dit : "Je pratique ce qu'on appelle l'Ésotérisme et les Sciences Hermé­tiques, pour mon plaisir (H2,9). Il donne les définitions des termes "occultisme", "paranormal", "ésotérisme", "hermétisme", "magie", "sorcellerie" à la fin de son entretien (H2,41-43).

_(H1 et H2) ont en commun leur sensibilisation à des phénomènes dits paranormaux : (H1) a expérimenté sur lui les cures de guérissage philippin (H1, 16); et (H2) dit vivre des expériences "paranormales"  tous les jours et dans chaque groupe, presque, de Bio-Energie (H2,12-13). Pour lui, le fait d'être en vie constitue le premier phénomène "paranormal" : "Un premier phénomène paranormal, c'est le fait que je sois venu au monde (. . . ). Depuis, à chaque fois que je marche, j’y suis confronté. A savoir : Comment est-ce que je tiens debout à la surface de la terre, sur mes deux pieds ?

Sinon, dans ma pratiique,oui. Dans la vie quotidienne aussi. " (H2,5 ).

Nous nous demandons toutefois si la même inspiration reichienne n'est pas à l'origine de leur attrait pour les phénomènes mystérieux ou qui relèvent d'une "intuition cosmique" (H1,23), car W. Reich, lui, parlait d"'orgone" comme d'une substance fluidique, vitale - symbolisant l'énergie - et parcourant l'univers et les individus. Or, tous deux font référence à un modèle énergétique (H1, 8 / H2, 6-7).

En outre, ils ont en commun de ne pas vouloir se reconnaître dans un mouvement théorique unique, de façon institutionnelle : "Je me reconnais nulle part et partout" dit (H1, 2) ."J'appartiens à mon école" ; "Je suis de ma formation", dit (H2, 2,4).

9°/ L'entretien I

Cet entretien arrive en dernière position dans notre tentative de catégorisation par importance représentative, parce qu'il nous semble le plus marginal.

Ce psychothérapeute, psychiatre de formation, donc, médecin, pratique en effet des techniques peu reconnues institutionnellement : Le Réve Eveillé Dirigé (G. I . R. E.D.) , dont le protocole est proche de celui de la psychanalyse (1,2), et la Méthode Tomatis, proche de la musicothérapie. Nous ne lui avons pas posé de questions détaillées à propos de ces deux techniques puisque notre guide d'entretien était centré sur les phénomènes dits paranormaux .

Il est très intéressé par les phénomènes de cette catégorie, en particu lier la télépathie qu'il a tenté d'expérimenter lui-même chez les enfants (et les adultes), (I,3-5), à l'aide d'un instrument de son invention et par le biais des statistiques : "Il n'y a que les statistiques qui peuvent donner une certitude à ce genre de phénomènes et dans tous les autres cas, on en est réduit à des opinions, des impressions" , (I,6).

"Mais je pense que ce phénomène existe", dit-il, (I,7).

Il suit - bien que non physicien - les théorisations contemporaines de la physique quantique (I, 27-28) qui lui semblent une voie d'appréhension de ces phénomènes (comme F1,8-9 ... ), avec des réserves toutefois : "Ca a l'air - de mon point de vue - effectivement une approche intéressante... Mais pour moi, ce n'est pas une preuve. Le fait qu'un physicien dise ça, ou deux, ou trois, ou dix, ça ne veut pas dire qu'ils ont raison" (I,27).

Selon lui, les recherches sur la "transmission de pensée" et la télépathie succèderont à l'informatique : "Ca deviendra - après l'informatique - la prochaine étape. Il faudra trouver autre chose... Je pense que ce sera ce domaine qui sera exploré. Mais je doute que ce soit nécessairement par la psychanalyse" (I, 23), avance-t-il.

Il s'intéresse également aux recherches des Soviétiques dans ce domaine, (I,12).

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