Effet de la pause sur les succès
Corine Cardona, Dess Statistiques et Bernard Auriol
De décembre 1993 à janvier 2001, 240 sessions de télépathie en groupe ont été réalisées. Chaque session s’est déroulée selon un protocole bien précis sur un ou plusieurs jours. Différents protocoles ont été utilisés au cours de l'ensemble du projet, mais le protocole était bien défini pour une session donnée. Les protocoles décrivent en particulier :
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Lors de chaque session, un certain nombre de personnes participe, ce nombre étant variable d’une session à une autre. Les séances se déroulent dans deux pièces visuellement et phoniquement séparées, avec dans une pièce les émetteurs et dans l’autre, les récepteurs. Les émetteurs ont pour rôle de "communiquer mentalement" aux récepteurs la cible qui leur est proposée. Les récepteurs se voient proposer un certain nombre de cibles possibles (le nombre étant fixé par le protocole) et doivent voter pour la cible qu’ils supposent être la vraie, à savoir, celle que les récepteurs essaient de leur communiquer. Pour des raisons de souplesse des essais, les participants se répartissent en début de session les rôles d’émetteur et de récepteur de façon volontaire. De ce fait, la proportion d’émetteurs (et de récepteurs) est variable d’une session à une autre (ainsi que leur nombre) mais stable tout au long d'une session donnée.
Chaque séance est composée de plusieurs essais collectifs. Un essai collectif se déroule de la façon suivante :
§ Les émetteurs ont à transmettre la cible qui apparaît sur leur écran; elle a été choisie par programme de type pseudo aléatoire (fonctions Randomize et Random de Turbo Pascal 7).
§ Les récepteurs ont à deviner cette cible parmi les n "cibles possibles" proposées. Ils peuvent s’abstenir de voter (volontairement ou par manque de temps). Le nombre de votes est donc légèrement variable d’un essai à un autre (pour une même séance)
Tous les 15 essais, une pause est proposée aux participants qui décident d’un commun accord de la prendre ou de continuer. Comme il s'agit d'une décision arbitraire de la part des participants, la seule série continue après la pause qui soit commune à toutes les after-pause est celle des 15 premiers essais après la pause.
La notion d’essai individuel s’applique au vote de chaque récepteur et la notion d’essai collectif s’intéresse au vote du groupe des récepteurs. Un essai individuel est un succès dans le cas où le récepteur considéré a voté pour la bonne cible. En ce qui concerne le succès collectif, deux visions peuvent être envisagées :
§ L’essai collectif est un succès dans le cas où le nombre de votes individuels pour la bonne cible est strictement supérieur à l’espérance (sous hypothèse de hasard). Dans le cas où il est égal à l’espérance, l’essai est qualifié de « Nul » et dans le cas où le nombre de bons votes est strictement inférieur, l’essai est un « échec ». Cette vision est discutable car elle ne tient pas compte de l’aléa. Une piste pour en tenir compte est proposée dans le document « ContexteStat et Ebauche Approfondissement.doc ». Dans l’analyse qui suit, cette vision a tout de même été développée puisqu’elle correspond à un système de récompense mis en place lors des essais.
§ L’essai collectif est un succès dans le cas ou la cible choisie par le plus grand nombre de votants correspond à la bonne cible.
Objectif : Comportement de Groupe et Psi
La solidarité avec les plus proches est plus importante pour la survie que la solidarité avec les plus lointains. Les groupes ont tendance à établir une communication plus intense entre leurs membres qu 'avec les membres des autres groupes. Les membres d'un sous-groupe ont tendance à privilégier la relation avec les membres de leur propre sous-groupe au détriment de la relation avec les membres de l'autre sous-groupe ou d'un groupe extérieur.
Hypothèse : En ce qui concerne l' expérience Agape, les groupes Agent et Percipient ne devraient pas échapper à cette règle : d' où l' hypothèse que plus la durée de leur séparation est grande et plus chacun d' eux se centre sur lui-même, ce qui pourrait nuire à la transmission de messages entre les deux sous-groupes. De là on peut émettre l' hypothèse (H1) que les essais effectués au début de chaque session (ou juste après une pause) seront plus éloignés du hasard que les essais effectués plus tard. En effet, les deux groupes sont mêlés avant de démarrer la session et pendant chacune des pauses (de 5 minutes à 30 minutes). Quant aux essais situés peu avant la pause, il conviendra d’examiner s’ils sont traités comme des essais éloignés de la pause ou proches du contact qui vient (les participants sentant que la pause approche, ils pourraient se reconnecter psychiquement à leurs amis de l’autre sous groupe) .
On peut déterminer les moments et les durées de pause grâce à l' heure qui est enregistrée pour chaque essai.
Les coups dans lequel la cible recueille un nombre de voix plus grand que l'espérance peuvent être conçus comme une forme de succès en mode dégradé. Etude du succès en mode dégradé
Un succès sera considéré comme tel si la cible correspond au vote le plus répandu. Par exemple, si trois votes sont pour la cible « 1 », deux pour la cible « 2 » et « quatre pour la cible « 3 » et que la véritable cible est « 1 », le vote majoritaire est un échec puisque la cible pour laquelle il y a eu le plus de vote est « 3 ». Etude du succès par le vote majoritaire
La décroissance du succès au cours des 15 essais qui suivent la pause, ne se vérifie que sous forme de tendance, pour l'instant non validable sur nos données.
Conclusion
Globalement quelle que soit la méthode pour déterminer le succès (vote majoritaire ou mode dégradé) les conclusions sont les mêmes.
Si on travaille par rapport à l'ordre de l'essai (1 :premier après regroupement, 2 : deuxième après regroupement ...) et que l'on représente les succès (après "redressement" pour pouvoir comparer) en fonction de l'ordre des essais, il n'apparaît rien de très intéressant, que ce soit pour 5 mots, 3 mots ou 2 images.
Par contre si on travaille pas "tranche" de 5 essais (1 : 5 premiers essais après regroupement, 2 : 5 suivants ...) et que l'on représente les succès en fonction de ces tranches, il apparaît une légère décroissance sur les 3 premières tranches (15 premiers essais) pour les protocoles à 3 mots et à 2 images (et rien d'intéressant pour les protocoles à 5 mots).
- Afin de vérifier la significativité de cette décroissance une méthode envisageable consisterait à construire des intervalles de confiance pour chaque point (pour chaque tranche), cependant, cette idée est très délicate à réaliser dans la mesure ou elle nécessite le calcul de la variance de la série.
- Le document « ContexteStat et Ebauche Approfondissement.doc » aborde le contexte théorique de l’étude et soulève certains problèmes pour l’approfondir. En effet, dans l’analyse précédente, tous les essais ont été considérés (hormis ceux dont le résultat du vote est nul) et il n’y a donc pas le même nombre d’essais pris en compte pour chaque ordre d’essai (ou pour chaque tranche). On ne peut donc pas introduire la notion de « milieu » ou « fin » de séries dans les conclusions. Il serait donc intéressant et même nécessaire de refaire le travail précédent en considérant des séries d’essais de même longueur. C'est ce que nous avons commencé à faire en prenant en considération les 15 premiers essais collectifs (3 fois cinq essais).
- Il se pourrait-il que le "rassemblement" favorise la communication mais pas toujours le succès, pour le vérifier, on pourrait étudier le carré de la différence entre le nombre de succès observé et le nombre de succès espéré sur les 5 premiers essais, 5 essais suivant, etc
- Par ailleurs, reste la piste de la variance des écarts entre les deux premiers succès, comparée à la variance des écarts entre le deuxième et le troisième succès, etc (Voir Campardon pour l'étude des écarts pour l'ensemble des coups). L’étude par les « écarts » peut se mener sur chaque individu et sur le résultat du vote.
- Sous réserve que l'on puisse confirmer que la décroissance entre le premier essai après la pause et les suivants est significative dans les protocoles à trois mots et à deux images, y a-t-il une différence de cette décroissance quand on compare les sessions ou les récepteurs connaissent mieux les émetteurs qu'ils ne se connaissent entre eux aux sessions ou les récepteurs se connaissent mieux entre eux qu'ils ne connaissent les émetteurs (cf. étude Leconte, Lagrange, Morer, etc ).
- Il pourrait être intéressant de vérifier, au cours d'expériences conçues à cet effet (pauses plus longues, utilisant des méthodes de "réchauffement" de l'ambiance groupale), si notre hypothèse de départ était justifiée. Nous tenterions alors de confirmer une différence que suggèrent nos données entre succès en vote majoritaire et succès en mode dégradé. Il se pourrait que le phénomène en mode dégradé soit plus net qu'en mode majoritaire :
pente en mode dégradé pente en mode majoritaire 5 mots ? ? 3 mots - 0.015 - 0.009 2 images - 0.019 - 0.017Si tel était bien le cas, on pourrait en inférer que le feedback-récompense donné pour le succès en mode dégradé serait impliqué dans cette différence.
Valeur de l’échange verbal du point de vue de l’évolutionL' échange de paroles aurait une fonction similaire à celle de l' épouillage chez les singes; quelle que soit notre culture, nous consacrons autant de temps à parler (20% du temps disponible) que les singes à s' épouiller mutuellement. La parole permet aux partenaires de se rendre ce service tout en poursuivant d' autres activités, puisque les mains restent libres. On peut parler à plusieurs personnes à la fois, alors qu' on ne pourrait "épouiller" manuellement qu' un seul individu. Le langage permet aussi d' informer et d' être informé sur les événements dont l' un des interlocuteurs n' pas été témoin. Dunbar a montré qu 'une conversation cohérente met en relation un nombre assez restreint de personnes (quatre personnes) Selon cet auteur, pour un nombre plus grand, il faut utiliser des artifices de procédure : un parle, les autres se taisent. Ce résultat reste à confirmer puisque l' expérience des T-Groups se fait classiquement avec un nombre de participants supérieur à sept et inférieur à vingt. Dunbar pense que "si le langage a évolué pour lier les groupes, et si le cerveau des primates est avant tout un cerveau social, alors les sujets sociaux devraient dominer les conversations". Par ailleurs, "les primates forment des coalitions pour se protéger ou conquérir le pouvoir dans le groupe." et "La réussite individuelle dépend fortement de la capacité à choisir ses alliés (...) L' individu qui reste seul est quasi sûr de perdre par rapport à ceux qui savent s' allier. A l' inverse, ceux qui acceptent toutes les alliances doivent partager les gains en davantage de parts. Les effectifs des coalitions s' ajustent donc sur une valeur intermédiaire, ce qui suppose que chacun doive attirer et sélectionner des alliés. (...) s' allier avec des individus capables d' acquérir l' information avant les autres serait aussi efficace que s' allier avec les plus forts physiquement. (...) La parole n' est pas une marchandise. C' est un moyen d' afficher sa propre valeur en tant qu' allié potentiel (...) pour être choisi. Note bibliographique :Robin I.
Dunbar, Le langage crée le lien social, La Recherche 341, Avril 2001,
pp.27-31 Robin I. Dunbar, Grooming, Gossip and the Evolution of Language, Harvard University Press, Cambridge (Mass.), 1996. Jean-Louis Dessalles, L'origine politique du langage, La Recherche 341, Avril 2001, pp.31-35 Michael C. Corballis, L'origine gestuelle du langage, La Recherche 341, Avril 2001, pp.35-39 |
[1] Le document « macro.doc » est une copie du code VB de « macro.xls ».
Pour exécuter les macros, il est nécessaire de changer les chemins d’accès des fichiers dans le code en fonction de leur emplacement chez l’utilisateur.