Homosexualité et changement
Jean-Marc
Je souhaite vous partager plusieurs choses sur la question de l’homosexualité. Cette réflexion se base essentiellement sur ma propre expérience. Je n’essaye pas de faire de mon parcours un modèle à suivre, mais je veux exprimer ce par quoi je suis passé et ce que j’ai pu éprouver au travers de ces étapes personnelles.
A mon sens, les médias donnent malheureusement une vision incomplète du sujet et mettent en avant une image homogène de la situation homosexuelle ou montrent une vision encore trop caricaturale ; alors que la réalité est bien différente. Il existe aujourd’hui des comportements d’ordre homosexuels qui s’apparentent davantage à de l’attrait pour le sexe qu’à de véritables attirances affective et sexuelle. La sexualité relayée par la mode et les médias devient pour les nouvelles générations d’avantage une activité ludique qu’un espace relationnel véritable. |
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A un niveau différent, certains hommes se sentent aspirés par un besoin affectif fort envers des hommes, sans forcément que cela soit, en premier plan, rattaché à une attirance sexuelle. Le mot « homo-sensibilité » est aussi utilisé pour intégrer cette dimension affective souvent sous entendu dans le mot usuel d’« homosexualité ».
Je constate actuellement que de nombreux hommes mariés sont démunis face à cette attirance non exprimée et demandent de l’aide. Là aussi, il n’y a pas qu’une seule forme d’attirance, mais une multiplicité de situations, selon l’histoire de la personne et son cheminement actuel, pour répondre ou non à cette attirance.
Alors, pourquoi ai-je le besoin de vous partager une vision personnelle de la question de l’homosexualité et mon expérience par le biais d’internet ?
J’ai cherché sur le net des éclairages à mes questionnements sans pouvoir trouver d’échos à mes désirs d’avancer sur une voie inhabituelle face à l’homosexualité. Je n’ai pas eu d’échos favorables à mon attente de changement.
Ce que j’ai trouvé, ce sont des témoignages au travers de personnes qui vivent leur homosexualité sans trop de problèmes apparents et qui revendiquent haut et fort cette « identité » au sein de notre société. Leur plainte est souvent rattachée à l’agression ressentie d’une société qui ne comprend pas et qui juge (c’est du moins leur perception). Au niveau social, le fait qu’ils ne puissent pas vivre leur homosexualité vraiment librement est une véritable souffrance, car ils se sentent rejetés et incompris.
Dans ma quête de sens et de vérité, c’est souvent face à ce type de témoignages que j’ai été mis en contact et qui ont rajouté une douleur à mon sentiment de ne pas être moi-même compris. J’ai douté en me disant que peut être, je me trompais, et que mes efforts pour lutter contre cette identité seraient inutiles ou inappropriés. Les peurs de me tromper m’ont fait naviguer entre les différentes visions sur l’homosexualité et j’ai mis du temps avant de trouver ma réponse et de clarifier mes désirs.
La confrontation à des témoignages différents m’a cependant bousculé dans cette quête insatiable de rencontrer quelqu’un de rassurant pour moi, d’aimant, qui comprendrait, et qui deviendrait un soutien exclusif. Cela a également motivé et éveillé un combat pour aller jusqu’au bout de ma démarche où j’ai cheminé seul assez longtemps.
J’ai mis du temps avant de saisir que vivre en couple avec un autre homme n’était pas LE chemin pour moi.
èQue dire de cette attirance qui m’habite, alors ?
C’est ce que je vais essayer de développer à travers ce message.
Ces quelques mots s’adressent aux personnes qui cherchent une issue différente à l’expression d’une vie dans l’homosexualité et qui ont le désir de s’en dégager. C’est peut être l’occasion d’écouter avec attention comment ce partage rejoint votre expérience personnelle et la direction que vous voudriez prendre éventuellement.
J’ai cherché, pour comprendre…
Ma recherche a commencé sur le net et ce que j’y ai lu, ne m’a aidé ni à clarifier ma pensée, ni à trouver un appui en vue d’un changement. Alors que je cherchais des alliés j’ai fini par trouver des contacts, qui m’ont emmené à « Torrents de Vie » en l’an 2000. J’ai finalement choisi de suivre ce parcours, parce qu’il correspondait à un besoin d’éclaircissement et de vérité, comme étant indispensable à une avancée personnelle.
Au travers de mes recherches, l’argument que j’ai souvent lu sur le net, est que l’homosexualité serait quelque chose d’interne à la personnalité et qu’il n’y aurait rien à faire que de l’accepter. La seule chose à faire serait de vivre au mieux avec son attirance, sans trop « se prendre la tête » et surtout sans chercher à changer car cela pourrait être très dangereux. Il faudrait alors s’accepter, s’assumer… et c’est tout.
Cette affirmation est pour une part juste. Cependant, elle omet que l’attirance en elle-même n’est pas un objectif pour exister mais qu’elle révèle un besoin…D’après moi, elle est souvent un des effets d’un manque profond et la conséquence d’une histoire personnelle blessée.
L’attirance envers les hommes était difficile parce que je l’ai vécue entre deux extrêmes : une grande fascination et une soif des hommes, d’un Homme, avec une attirance très forte dans ce qu’il représente pour moi et que je n’ai pas… En même temps, une peur terrible de m’approcher de trop près, parce que je ne comprenais pas pourquoi j’étais à ce point attiré par des hommes. J’avais le sentiment que les autres renfermaient une force et une sécurité que je n’avais pas ; j’avais besoin de me sentir protégé. J’ai eu besoin de vérifier ce que recelaient les autres hommes alors que je croyais être privé ou du moins être défaillant dans mon identité en tant qu’homme. Du coup, ma relation avec les femmes était insignifiante, car ma véritable préoccupation restait rivée sur les hommes, tout en ne restant pas très à l’aise avec cela.
Le silence a été mon refuge pendant des années : peur d’être rejeté, peur d’être mal compris, jugé, peurs de toutes sortes. Mes difficultés se sont accumulées et amplifiées avec le temps. Malgré tout, ce temps de silence m’a fait avancer dans l’écoute intérieure, l’attention de ce qui m’environne et dans l’expression de ce que j’éprouvais.
Je suis étonné de tout le parcours fait seul mais aussi avec d’autres. Le sentiment de solitude m’a accompagné par rapport au choix de ne pas accepter ma situation. J’ai été comme mis à l’écart tout en ne pouvant pas m’intégrer à d’autres. Est-ce à dire que j’avais besoin d’être encouragé, épaulé dans ma démarche ? … Oui : avec tout les paradoxes d’un parcours chaotique, dans un processus long de « régénération ». C’est un chemin où tout est à construire, à conquérir, alors que tout semblait détruit ou perdu (cf. le fils prodigue).
Confrontation à d’autres positionnements que le mien.
Et incompréhensions.
On peut dire aujourd’hui que l’homosexualité est aujourd’hui bien acceptée, du moins tolérée en France.
Malgré tout, j’ai eu l’impression de vivre un rejet par rapport au fait d’être attiré par des hommes : tout d’abord par les rares personnes à qui j’ai parlé de mes attirances et qui voulaient trouver des solutions pour moi. Elles me trouvaient différent, non conforme à ce que je montrais et je me suis senti mauvais, pas vraiment à ma place et surtout jugé. Au travers de ce rejet, j’ai compris, d’une certaine manière, l’attitude des personnes qui cherchent à dire leur réalité pour sortir de la souffrance d’un sentiment de double vie ou de non vérité envers les autres…
Pour ma part, j’attendais de mes amis un accueil qui m’aurait aidé à être moi-même sans fuir ce que je vivais caché, dans le silence : j’avais besoin d’écoute et de présence. J’ai été très blessé de voir que l’amour ou l’intérêt des autres pour moi n’étaient vrais que de manière conditionnelle. J’ai saisi la fragilité des relations et des amitiés qui sont si rares.
Par ailleurs, j’ai également souffert du rejet des personnes homosexuelles elles-mêmes et de leur incompréhension, vis-à-vis d’un homme qui ne désire pas vivre l’homosexualité. J’ai eu droit à des réactions très maladroites quand j’ai partagé mon désir de changement. Je crois comprendre pourquoi : tout le processus d’acceptation de l’homosexualité demande un véritable combat et une maturation lente dans l’acceptation. Il demeure beaucoup de colère et d’amertume face au discours anti « gay » et/ou homophobe, qui les exclut. Au fil de cette démarche, j’ai été malmené par des discours qui mettaient en doute mon désir de changement avec des arguments blessants, des affirmations sans aucune nuance, appuyant sur mes attirances et mes fantasmes vers les hommes, niant mon questionnement, et n’accordant pas de crédibilité à ce que je pouvais partager. De ces personnes qui revendiquent la tolérance et le respect, je me suis senti doublement exclu.
Dans le milieu « gay », je crois que cela touche au scepticisme sur ma démarche et j’ai conscience d’une guerre ouverte contre les mouvements de « restauration » qui disent haut et fort qu’un changement est possible (Exodus, « People Can Change », …) Ce que les personnes qui ont un mode de vie « homosexuel » ne réalisent pas , c’est que beaucoup d’hommes s’enferment dans une existence mortifère à cause de cette double incompréhension (avec d’un coté les proches qui ne comprennent pas l’homosexualité, et de l’autre les personnes homosexuelles celles qui rejettent l’éventualité d’un changement). Je n’attends aucun encouragement de la part de personnes qui militent pour l’homosexualité mais un minimum de respect pour les personnes qui cherchent à en sortir. Je suis étonné par le manque de discernement de ce que j’ai lu et entendu. Sous prétexte de vérité, certains sont prêts à dire n’importe quoi pour asseoir leur idéologie pro-gay…Le changement pour beaucoup semble incongru et insultant...
è Pour aller au-delà de ce débat stérile, je vais tenter de répondre à cette question :
Quel type de changement puis-je envisager ?
Pour moi le changement si situe à plusieurs niveaux.
1°: j’ai accepté la réalité telle qu’elle est.
Cette attirance est réelle, elle fait partie de ma vie. C’est le premier changement : passer d’un déni à une acceptation, malgré la douleur que cela provoque, malgré les sentiments contradictoires que cela réveille. Ce n’est pas facile dans le monde dans lequel nous vivons, où l’homosexualité est encore montrée du doigt, et où habituellement, un homme est attiré par une femme.
Il est normal de tâtonner dans la recherche de qui nous sommes. Le besoin d’unification intérieure nous emmène à être vrais avec nous-mêmes, d’arrêter de fuir dans le mensonge. Cette fuite peut se traduire par un déni de la réalité ou par la recherche de palliatifs qui ouvrent à des dépendances. Cela ne fait que retarder ce nécessaire face à face avec soi-même et contribue souvent à amplifier une confusion intérieure.
En revanche, l’argument qui ferait croire que l’homosexualité est une alternative à l’hétérosexualité est faux à mes yeux, car il s’agit d’un autre mode de vie qui n’a rien à voir avec la vie conjugale « classique ». C’est une réalité particulière, par ailleurs différente de l’amitié entre deux personnes.
2°« Aller au-delà de cette attirance pour aller voir ce qui m’attire vraiment quand je suis attiré par un homme ».
Beaucoup de personnes ne dépassent pas le stade du constat de leur attirance. « Je me sens bien auprès d’un homme. J’ai besoin de ça, donc je vais vers cela pour répondre à mes besoins »
Pour ma part, je crois que ce qui peut être aidant, c’est d’être en contact avec cette réalité et d’essayer d’aller plus loin qu’un simple constat ou de se dire : « c’est mon identité ».
Je fais ici une précision sur la question de l’identité homosexuelle. Pour moi, je ne « suis » pas homosexuel : « j’ai des attirances envers les hommes », mais cela ne m’identifie pas en tant que personne. L’attirance homosexuelle est difficile à gérer et angoissante. Elle prend toute la place et on finit par croire que mon identité, c’est « je suis » homosexuel. Je suis un homme, mais mes besoins me poussent à aller vers les hommes. Je pense qu’il est important de différencier l’identité de l’orientation sexuelle qui est une partie de mon existence mais qui ne me définit pas dans ce que je suis profondément. (Les mots sont importants et utiliser un mot pour un autre conditionne aussi des comportements ou une attitude personnelle).
Je crois que, s’il ne faut pas être dans le déni de son attirance, il ne faut pas non plus être dans un « collage » identitaire à cette attirance. Le risque est de se fondre dans un mode de vie régi par des codes et des comportements « gays », d’être dans l’appartenance à une communauté factice où le seul lien serait une reconnaissance au travers de son attirance affective et sexuelle. Toute ma vie peut tourner autour de cette attirance, jusqu’à en devenir la préoccupation première, comme le seul pôle de réflexion. J’ai moi-même eu du mal à me détacher de ce pôle là. Je crois que cela vient du fait que tout devient conditionné par cette recherche et ce besoin d’un complément masculin. Malgré l’importance que cet aspect de ma vie peut prendre, je ne m’identifie pas à l’homosexualité. Mon identité est d’être un homme avec comme particularité une attirance envers les hommes.
Je crois qu’il n’est pas juste de s’identifier en tant qu’homosexuel, y compris si la personne fait partie d’un mouvement qui revendique des droits pour des personnes vivant cette réalité. Nommer cette réalité, n’est pas l’assumer en tant qu’identité.
3° Qui suis-je en tant qu’homme ? (faire mémoire et comprendre)
Pour moi, un réel changement commence par être dans une attitude juste vis-à-vis de son attirance. Se détacher de cette identification m’amène à rechercher une identité d’homme. Cette attirance m’a amené à m’interroger sur mon identité qui me semble abîmée ou « brisée ».
J’ai découvert en m’approchant d’autres hommes que je ne savais pas qui j’étais. Chaque rencontre a été d’autant plus frustrante que l’autre n’avait rien à m’apporter dans cette béance affective. J’avais peur de moi-même et de ce que je ressentais, avec cette attente d’une réponse à mes questions existentielles. Au fur et à mesure, j’ai commencé à avoir des ébauches de réponses dans des rencontres, y compris dans la promiscuité ou dans des relations éphémères toujours pas satisfaisantes.
« J’ai donc à chercher à savoir qui je suis en tant qu’homme »
J’ai mis beaucoup de temps à sortir du silence. De plus la pression psychologique a intensifié l’urgence d’entrer dans l’intimité d’autres hommes, alors qu’au départ cela me pétrifiait. J’ai fini par trainer et par chercher des relations intenses pour me sentir exister. Comme je n’arrivais pas à entrer en relation de confiance dans la vie courante et par peur d’être découvert, rejeté ou jugé, j’ai fini par trouver de l’intensité dans les relations sexuelles qui m’emmenaient à me détester et alimentaient ce besoin d’un soutien inconditionnel d’un autre homme. Sur le moment, je pouvais être bien, parce que cela me donnait l’occasion de faire sortir toutes les tensions, avec le contraste d’un dégout profond de la vie. J’ai fini par vivre une dépendance sexuelle entre prostitution et séduction. Ma recherche d’homme s’est transformée en cauchemar par mon silence. Cette dépendance a ponctué tout mon parcours, avec des moments de répits puis des « chutes » lamentables dont je ne suis pas fier.
Tout cela m’a emmené à me questionner sur moi-même et à rechercher ma véritable identité. Outre la dépendance sexuelle qui est une difficulté à part entière, l’attirance envers les hommes s’est modifiée au fur et à mesure que j’ai intégré cette réalité, sans chercher à compenser par le sexe, mais en faisant face à mes réels besoins : comprendre qui je suis et m’aimer tel que je suis.
Ce besoin d’intimité avec d’autres hommes est si puissant ! J’ai été obligé de reconnaître le manque affectif, avec mon père en particulier et l’attente énorme de cette reconnaissance d’être son fils. J’ai trouvé une bonne manière de répondre à ce besoin par des relations vraies avec d’autres hommes, des relations d’amitiés saines, tout en n’idéalisant pas l’amour d’amitié magnifié dans les écrits d’Aelred de Rievaulx (moine cistercien du 12° Siècle) et cela à cause de mon passé de dépendances sexuelle et affective.
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Ce que je retiens également c’est l’intimité que j’ai découvert petit à petit avec Dieu, qui traverse mes besoins d’amour et d’affection. C’est une véritable oasis de paix que Dieu nous propose mais nous ne savons pas toujours l’accueillir. Je crois que cela est dû au fait que nous nous centrons sur nos soucis ou nos angoisses ce qui nous empêchent d’élever nos regards vers Lui.
La présence de Dieu est cet espace de rencontre qui rétablit notre véritable identité d’homme, de fils, de père…
Accepter la réalité de ce que je vis ; M’identifier en tant qu’homme et non en tant qu’homosexuel ; Découvrir qui je suis en tant qu’homme au travers des autres hommes et de Dieu ; voici les trois premiers aspects qui me semblent importants d’entendre pour commencer sur la voie d’une démarche de changement face à l’attirance envers les personnes du même sexe. Tout cela représente un énorme travail de mise à plat de sa propre existence.
C’est en partie au travers du parcours de Torrents de Vie que j’ai pris conscience que ce travail de changement ne peut se faire qu’en acceptant de revenir sur des blessures du passé et de l’enfance en particulier, et en reconsidérant avec objectivité les relations avec son père et sa mère. La priorité dans ce travail n’est pas de se changer en « hétérosexuel », car cette démarche est vouée à l’échec si « devenir hétérosexuel » est considéré comme le seul objectif. L’important c’est de reprendre à bras le corps toute sa vie, sans se crisper sur cette insatisfaction de ne pas coller à la norme, parce que cette obsession peut être aussi un obstacle à accueillir ce qui a besoin d’être revisité en soi. J’entends souvent que des personnes veulent changer d’orientation, parce que ce n’est pas « normal » et que cela n’est pas cool…
Les véritables changements ne se font pas uniquement par détermination même s’il faut beaucoup de volonté pour lâcher certaines habitudes, certains regards… Les changements qui peuvent se produire sont simplement la conséquence de choses qui se sont débloquées ou qui sont finalement accueillies comme non destructrices. Je peux alors continuer une maturation personnelle, avec ces quêtes et ces tâtonnements propres à toute vie.
Ce qui détermine vraiment ce que nous vivons concrètement dans nos relations d’aujourd’hui, c’est que ce que nous avons reçu de nos parents lors de notre enfance. Sauf exceptions, toutes les personnes attirées par des hommes ont tous en commun une difficulté, un problème avec les parents : manque de père et surprotection de la mère (avec des niveaux plus ou moins importants, mais on retrouve ce schéma dans la plupart des expériences). Cependant, la réalité objective n’est pas forcément ce qui est à retenir : l’enfant peut très bien avoir ressenti un manque de la présence de son père à un moment donné, et ce qui prédomine, c’est la manière dont l’enfant a ressenti le manque de son père ou l’investissement excessif de sa mère… Beaucoup minimisent ces réalités psychologiques qui conditionnent toute une vie ou encore les occultent ou argumentent qu’il n’y a pas de problème et que chacun doit assumer sa vie. …
« La personne homosexuelle n’a pas plus de problèmes que d’autres », objectent certains, et « elle a à accepter toutes les composantes de sa vie et vivre librement ses attirances. Finalement c’est plus facile de vivre « avec » que de résister toute sa vie à des attractions incontrôlables ». Avec des arguments qui reflètent une certaine vraisemblance, il semble qu’il n’y ait rien d’autre à faire que de vivre son homosexualité.
« Dieu ne nous aime–t-il pas chrétien et gay ? »
Je ne suis pas d’accord sur ces discours qui veulent justifier d’une identité homosexuelle faussée par une autojustification. De fait, Dieu nous aime tel que nous sommes, créés hommes et femmes. Cependant, une réponse plus nuancée est bienvenue et j’espère qu’elle sera respectée. D’un part, rien n’est irréversible dans l’orientation sexuelle. L’amour de Dieu dépasse toutes les situations. D’autre part, Dieu ne répond pas à cette question, car il ne nous a pas créé « homosexuels » mais homme ou femme. Il aime parfaitement tous les hommes gratuitement, quel que soit la situation que la personne traverse ou les pensées qui l’habitent.
Tout cela pour revenir sur la genèse de mon histoire personnelle, car il y a toujours une origine à nos attirances et à nos comportements d’aujourd’hui. Je crois qu’il faut accepter de faire face à son passé, avec ses souffrances, ses blocages, ses angoisses…pour aller plus loin que le conditionnement psychoaffectif qui m’oriente d’une certaine manière vers les autres et dans mes attentes affectives.
4° Se réapproprier son passé…
Il s’agit donc de revisiter mon passé, « tel qu’il est », de revivre les situations, non pas à partir de ce que je vis aujourd’hui, mais en fonction de la place d’enfant que j’occupais. Cet enfant intérieur demeure en moi. Plusieurs auteurs parlent de la place importante et des besoins de cet enfant intérieur. Il peut être resté dans des étapes bloquées par des abus, des vœux intérieurs qui induisent des refus de tout ordre…Avec les émotions qu’elles véhiculent. Tout l’univers de l’enfance a besoin d’être pris en compte avec sérieux, car c’est souvent la clef qui ouvre des portes à des refus de pardon, de l’amertume…, quant bien même ces difficultés semblent avoir été aplanies aujourd’hui à l’âge adulte. Je crois que cette démarche de « revisitation » de son passé ne peut pas s’effectuer seul : un accompagnement est nécessaire. Dans le cadre du « parcours Torrents de vie », j’ai revécu cette genèse et la particularité de ce temps de l’enfance devant le Seigneur. Il est étonnant que dans la vérité du ressenti et des émotions le Seigneur donne un regard différent et sécurisant dans des situations parfois de grandes souffrances. Il n’existe pas de méthode particulière. Il suffit d’accepter son passé tel qu’il est avec le soutien de la présence de Dieu. Je constate que pendant les moments de grande souffrance l’enfant se protège et se coupe de ses émotions. Il devient alors comme insensibilisé, tout cela pour se protéger. Ce fut mon cas. J’ai compris que je ne pouvais pas m’accueillir comme homme si je n’accueillais pas avec courage, entouré par d’autres personnes et par Dieu, cette souffrance de mon passé, sans peur aujourd’hui d’en être détruit. Je me suis protégé comme je pouvais de ce qui m’était nuisible. J’ai eu besoin d’être en contact avec mes émotions ; en particulier ma colère face à mon père toujours absent ou fatigué, colère que je n’ai jamais pu exprimer enfant, parce que j’avais peur de ne plus être aimé. Du coup, j’avais mis des barrières qui m’avaient complètement bloquées dans un processus de maturation personnelle, en retournant contre moi toute la faute de mon père absent : je devais ne pas être assez gentil ; J’ai pu alors exprimer cette question que je m’interdisais de penser étant enfant« pourquoi papa ne m’as-tu pas aimé ? », parce qu’elle m’aurait anéanti.
Je crois qu’il est important de prendre le temps de parler de ces blessures-là qui conditionnent tous les besoins envers les hommes, dans un accompagnement psychologique, ou dans un parcours suffisamment sécurisant pour exprimer ses fragilités passées.
La réalité pour l’enfant à ce moment-là est son ressenti. La difficulté essentielle est que l’enfant se coupe de ses émotions pour ne plus souffrir, ne se sens plus en sécurité et a peur. Il refuse de se fier à ses émotions pour entrer dans un contrôle de ce qu’il peut recevoir. Cela a pour conséquence qu’il peut également ne plus recevoir les bonnes choses que son père ou sa mère lui donne, cet « héritage » qui l’aiderait à murir et dont il a droit.
Ce que mon père va vouloir me donner, je ne peux pas le recevoir, parce que j’ai érigé un mur entre lui et moi : car, la douleur est trop forte et je ne veux plus souffrir... A un niveau plus ou moins conscient, un vœu intérieur se forme : « je ne serai pas comme lui, ce qu’il me transmet n’est pas bon ».
De fait cet enfant grandit sans l’identification envers son propre père, (s’il n’a pas une image paternelle qui lui redonne confiance en ce qu’il peut recevoir d’un homme).
Il y a des blessures plus complexes. Par exemple la mère qui dénigre son mari devant l’enfant et qui détruit sans le vouloir l’image du père. Il y a également les abus qui peuvent être des abus sexuels, la dévalorisation systématique de ce que fait l’enfant, le rejet pour des raisons particulières (enfant non désiré, handicap), ou par la négligence d’un parent qui ne s’occupe pas de son enfant correctement. Il a donc des carences. Adulte, la personne réalise qu’elle a peut-être vécu une négligence. Il faut alors prendre soin de l’enfant intérieur qui s’est barricadé, qui a perdu confiance en lui, perdu confiance dans les adultes…
Adulte, la personne a besoin de se sentir homme.
M’étant littéralement enfui du contact de mon père, il m’a été difficile de retrouver cette masculinité. Pour reconstruire cette confiance et cette assurance dans mon identité d’homme masculin, je continue à m’accueillir et à prendre soin de cet enfant du passé qui m’interpelle parfois et qui m’aide à entrer dans une plus grande maturité.
J’ai cherché mon identité d’homme, d’une certaine manière dans l’homosexualité, car c’est la seule réponse qui s’ouvrait à moi de manière spontanée. Je ne regrette pas ce que j’ai vécu, mais je me rends compte du temps qu’il ma fallu pour accueillir l’homme mûr en devenir que je suis aujourd’hui. Je réalise cela au travers des actions concrètes que je fais au quotidien et dans les projets que je réalise.
J’ai continué pendant longtemps ma recherche d’identité dans l’homosexualité mais au fil de mon évolution, j’ai perçu que j’étais en décalage avec ce que je vivais de l’intérieur. Ma recherche d’intimité et de sexualité envers les hommes s’est espacée, jusqu'à ne plus m’enfermer.
Il serait donc souhaitable de prendre les moyens de revisiter son enfance, pour se réconcilier avec soi même et ses parents : un véritable changement n’est possible que si le pardon se fait avec ses propres parents. Cela peut sembler impossible et inaccessible ; mais c’est le prix à payer pour être vraiment libre et recevoir tout ce dont j’ai besoin pour vivre libre.
Aujourd’hui, je me sens vraiment proche de mon père. Je réalise de plus en plus combien je lui ressemble. Je comprends les personnes qui refusent de ressembler à leur père parce qu’elles ont été maltraitées ou qu’elles ont une image négative de leur père. Malgré tout, la fermeture que cette vision négative provoque en soi ne permet pas d’accueillir sa véritable identité de fils. Comment faire la part des choses entre ce qui est bon de recevoir de son père et ce qui ne l’est pas ? La réponse se trouve dans le désir de pardonner. Après avoir pardonné à mon père du fond du cœur, les bons moments passés avec lui ont ré émergé. J’ai pu le voir différemment et me construire avec ce qu’il m’avait transmis, tout en ne niant pas la réalité du passé.
Le surinvestissement maternel a différents effets, mais je retiens que souvent l’enfant (et l’adulte ensuite) n’ose pas dire « non » de peur de ne plus être aimé…, Il m’a été difficile de m’imaginer vivre avec une femme, celles-ci représentant l’omniprésence et l’intrusion constante dans ma vie. Des mécanismes de défenses peuvent se produire, ce qui fut mon cas, ou encore une incapacité à se détacher de sa mère (ce qui peut être vrai pour tout homme ayant été investi de manière excessive).
Dans ce processus de changement, la foi en Dieu a pu se développer tout au long de mon cheminement…
En qui pouvais-je faire confiance ?
La relation à Dieu m’a ouvert à une guérison profonde d’une juste estime de moi-même. J’ai été encouragé et reconstruit intérieurement dans l’intimité avec Dieu.
Sur d’autres niveaux, mais tout aussi importants, le pardon a un effet guérissant sur ma vie, y compris vis-à-vis des personnes qui ont jalonnées mon enfance et mon adolescence. Ces personnes restent comme liées à moi tant que je les retiens à cause du mal qu’elles m’ont fait. Adulte, je reproduis les mêmes réactions de défense vis-à-vis des autres, qui éveillent en moi la souffrance de l’abus passé ou toute autre forme d’abandon. Cela contribue à rester dans la prison de l’amertume et des rejets répétés.
5° Reprendre confiance en soi devient l’élément essentiel d’une démarche de liberté face aux autres.
Cette démarche de restauration de ma confiance en moi-même m’a aidé à lâcher toute mes insécurités et cette attente vis-à-vis des hommes. Dieu ne trahit pas, Lui demeure fidèle. Je me suis senti rejoint par Dieu au plus profond de mes relations blessées. J’ai découvert dans l’intimité avec Dieu mon identité de fils : Dieu est Père, Dieu ne nous laisse pas orphelin. Je crois qu’en étant dans cette vérité de la relation avec Lui, nous pouvons être comme nourris de l’intérieur par ce Père qui donne la vie en abondance.
Tout ce que j’ai entendu dans mon passé m’a fait croire que j’avais telle ou telle identité. En étant en vérité devant le Seigneur, j’ai compris qu’à partir de ce que j’ai entendu de moi, je me suis construit un faux personnage, une fausse identité. Pour plaire aux autres, ne pas me retrouver seul, pour sauver la face, pour me faire aimer au-delà des étiquettes que j’avais fini par adopter, j’avais mis en place toute une panoplie de stratégie de séduction pour exister et me sentir exister, me sentir aimable par les autres. J’ai tout fait pour « acheter » quelque part le regard et l’attention des autres.
Cette relation intime et nourrissante avec Dieu m’a aidé à accueillir le vrai moi, ma véritable identité… Accueillir qui je suis en vérité est vraiment une grâce particulière. Nous avons besoin d’une rencontre intérieure pour que nous saisissions qui nous sommes vraiment. Cette connaissance de nous même n’est ni écrasante, ni destructrice : elle rend libre. J’avais vraiment peur du « vrai moi », car j’étais presque sûr de ne pas avoir de valeur, que j’étais mauvais. Cette perception faussée, cette manière de me définir venait de beaucoup de choses que j’avais entendu et que j’avais fini par croire…Tout cela me minait et m’isolait…Mon rapport aux autres était difficile parce que je portais un masque. J’étais comme enveloppé d’une véritable carapace qui me permettait de ne pas être atteint ou déstabilisé par le jugement des autres (du moins, je le croyais). Devant eux, je me comportais en fonction de mes fausses croyances pour compenser la mauvaise image que je portais. Le plus dramatique est de finir par croire que cette fausse identité construite sur des années est la vérité de qui on est. De ce fait, je me suis considéré longtemps comme un homosexuel, parce que des personnes m’ont défini ainsi, à différents moments de ma vie.
Dans ma prière, Dieu ne m’a jamais défini comme un homosexuel, mais comme son fils, comme celui qu’Il chérit. Il ne m’a pas encouragé dans cette voix, mais a toujours soutenu quand j’étais dans la détresse face à des besoins de sécurité ou de force.
J’ai eu beaucoup de mal à sortir de ce mensonge face à mes croyances sur moi-même. Je crois que se laisser enfermer ou de s’enfermer dans des étiquettes n’attirent que le mensonge vis-à-vis de soi et des autres…Je me suis retrouvé dans des situations de mensonge pour ne plus être rejeté. Comprenez bien que cette fausse identité finit par devenir une véritable barrière à la liberté intérieure…
En écoutant tout ce qui m’a semblé mauvais ou bon en moi, j’ai pu vérifier avec le Seigneur la véracité de ce que je porte. J’ai découvert la pédagogie de Dieu qui me respecte dans ce que je peux recevoir et qui me guide peu à peu dans une vérité plus juste sur moi-même dans la prière mais aussi par l’intermédiaire des autres. Le Seigneur me donne aussi d’accueillir sereinement mes fragilités et mes faiblesses humaines. Le fruit de cette vérité sur moi est de pouvoir m’accueillir tel que je suis avec mes imperfections et de reconnaître mes véritables besoins… Cela m’aide à délaisser mes masques et à sortir de mes monologues, pour entrer dans un dialogue.
Sortir du silence devient alors très important, mais dans un dialogue avec Dieu, avec les autres. Il y a peu de temps que j’apprends à écouter vraiment. Un peu comme si jusqu’à présent j’avais été empêché d’avoir une oreille « ouverte ». C’est un peu cette invitation que je voudrais vous faire après avoir beaucoup parlé du « moi », du « je ». C’est d’accepter d’écouter au-delà des obsessions et des certitudes personnelles, c’est de s’ouvrir à l’Autre qui est le divin qui vit en chacun de nous. Il nous invite à accueillir un souffle nouveau, une vie nouvelle qui n’est pas centré sur le « moi ». C’est une dimension qui m’a été longtemps inconnue, parce que je ne pouvais regarder que mes problèmes, que moi, à cause de la douleur et de la souffrance ressentie.
Essayons de lâcher cela pour une écoute qui s’ouvre largement et qui n’a plus peur d’être anéantie. Quand on a un masque, il est impossible de s’exprimer en vérité. Puis-je dire à Dieu ? : « J’ai besoin de toi, Seigneur ».
J’ai toujours pensé que personne ne pouvait me venir en aide, et ensuite j’ai cru que je m’en sortirais tout seul.
6° Sans doute, est-il nécessaire de reconnaître que nous avons besoin des autres pour exister et pour avancer.
La relation était devenue dangereuse au point de me couper des autres. Ils représentaient un danger. J’ai appris à être vrai et à remettre mes peurs d’être rejeté au Seigneur. Peut-on avancer avec un masque ?
A la limite, tant pis si les autres me rejettent, c’est finalement leur problème… Même si je peux ressentir cela de manière douloureuse. Nous pouvons être amenés à croire que « quand je suis rejeté, c’est parce que je ne suis pas suffisamment bon » ou que « c’est moi qui suis fautif de quelque chose que je ne comprends pas ».
L’autre est entièrement libre de me rejeter ou de m’accepter en tant qu’adulte. J’ai mis du temps à comprendre et à entendre que cela ne m’enfermait pas dans une identité de mauvais garçon, comme cela a pu être le cas dans mon enfance avec mes parents. Pour beaucoup de personnes, cette peur de ne pas être aimé est tenace. Je remets régulièrement devant le Seigneur ce besoin d’être aimé, reconnu, encouragé, entouré…Cela m’a demandé l’effort d’être vrai et de ne pas chercher à me justifier tout le temps par peur d’être montré du doigt. Le besoin d’être vrai est une attitude vitale pour sortir du repli sur moi et être libre face à mes peurs. Je me suis ouvert et ceux qui me connaissent peuvent en parler…
Le changement ne se situe pas dans le passage de l’homosexualité vers l’hétérosexualité mais bien dans l’histoire, l’histoire sacrée de la personne qui vit cet attrait envers les autres hommes. Cet enfant qui a grandi, a capté de ses parents, des adultes qui l’ont accompagné ce qu’il a pu, tout en s’adaptant à ce qu’il a perçu de ces modèles.
N’avons-nous pas besoin d’accueillir la vraie liberté dans des relations saines et nourrissantes, sans nous crisper sur la vie passée ?
« Tu es attiré par des hommes, et ce que tu vis aujourd’hui est sûrement une conséquence directe, une adaptation de ce que tu as vécu pour éviter de trop souffrir. »
C’est ce qui ressort de l’ensemble de mon parcours : avec le temps l’homosexualité s’est transformée et elle prend aujourd’hui un autre visage.
J’aime les hommes, parce que je découvre profondément qui je suis, sans la peur de manquer, sans la peur d’être manipulé ou abandonné. Je suis également sorti de ma position victimaire : j’ose enfin croire en moi…
Dans la société d’aujourd’hui il y a un véritable mensonge que personne n’ose dénoncer. L’homosexualité avec les formes d’expression affective et sexuelle qu’elle renferme n’est pas une alternative à l’hétérosexualité. Elle est une réponse à un besoin affectif non comblé et une adaptation à ce manque. Il est de bon ton de dire que si les personnes sont heureuses, elles peuvent vivre ensemble sans problème, en vivant toutes les dimensions d’une alliance comme un homme et une femme peuvent le faire. Peut être… Mais c’est masquer la réalité de la recherche initiale : cette recherche affective masculine non comblée : vivre l’homosexualité ne répondra pas à ce besoin…
A chacun de s’interroger à ce propos.
L’appel que je reçois pour moi est de vivre une identification masculine avec d’autres hommes par le biais de relations saines ou d’amitiés. J’accepte aujourd’hui de rester à l’extérieur d’une forme d’intimité envers les hommes, alors que pendant des années j’ai été fortement dépendant, soit sexuellement, soit affectivement ou les deux, selon mon évolution.
Comment se situer vis-à-vis des hommes ?
Si ces manques et ces besoins sont résolus, il y a immanquablement des changements sur la manière d’aborder les hommes et les femmes.
Par exemple si à 30 ans, je pardonne à mon père, il faudra sans doute du temps pour que cela ait un impact sur ma vision de lui et, indirectement, sur celle envers les hommes en général. Mais une maturation va se faire. Mon rapport aux hommes a évolué sur 15 ans. Chacun évolue à un rythme qui lui est propre et en quelques années un véritable changement peut s’opérer…
D’un détachement et d’une recherche fusionnelle avec les hommes, je suis passé à un amour vrai avec ceux que je rencontre. Je suis heureux et suis rempli de joie d’être proche d’hommes avec qui je suis vraiment en communion et de me sentir compris et aimé. Je me nourris de ces relations, mais elles ne sont plus dans une avidité sexuelle et affective, mais dans un échange où je reçois énormément. Je vois vraiment une nette différence entre mon attitude qui tentait de prendre chez l’autre ce qui me faisait envie, et aujourd’hui quand j’accueille chez l’autre sa spécificité, son unicité et sa vérité.
J’ai accueilli mon histoire entière et pas seulement mon attirance, comme une chance de pouvoir grandir dans la confiance, sous le regard de Dieu. C’est le fruit d’un certain lâcher prise et d’un amour retrouvé. Petit à petit, les manques que j’avais du mal à gérer ont été nourris par la relation avec d’autres hommes que j’apprécie et par le Seigneur qui agit. Tout cela est un processus long mais effectif.
La rencontre avec d’autres hommes qui ont un chemin similaire au mien m’interpelle,
me déstabilise parfois. J’apprends à les accueillir simplement et à me situer
dans de saines limites, celles-ci étant toujours porteuses de libérations.
Il me semble que les relations entre hommes sont capitales, mais avec la prudence des relations de dépendances affectives qui génèrent de l’angoisse face à la perte possible de l’autre. Avec les manques affectifs, je peux avoir tendance à polariser sur une personne qui viendrait me faire exister et me donner un sentiment d’exister. Il peut y avoir une idéologie de la relation d’amitié qui met l’autre à une place idéalisée. Je crois que dans la relation à Dieu, je peux discerner la place que prend l’autre, place qui peut être excessive. Je finis par exister par le regard de l’autre et non par moi-même. Une vigilance est à observer à ce niveau.
La dépendance affective, n’est pas de l’ordre de l’attachement envers une personne. Ceci dit, par expérience et parce que j’ai été souvent dans des situations de dépendances et d’attentes démesurées, je constate que quand le manque est important, nous avons tendance à nous accrocher à l’autre comme on s’accrocherait à une bouée de sauvetage. Dans des relations d’homme à homme qui cherchent une amitié équilibrée, ou une liberté dans la relation, le risque est un isolement à deux et une idéalisation de l’autre. La paix intérieure est un critère qui permet de discerner dans quel type de relation nous avançons (y compris en l’absence de l’autre auquel je m’attache).
L’autre n’est pas mon sauveur, ma béquille, ou un substitut paternel. Je demeure libre et l’autre aussi, mais des relations d’amitiés saines sont possibles voir souhaitables pour retrouver un équilibre personnel qui ne s’installe pas dans l’obsession du manque affectif.
Tout cela représente une attitude plus ajustée qui va me faire progresser vers des relations guérissantes. Ce type de relations m’aide à sortir de l’angoisse de la solitude et du manque… Me fait sortir de la fascination de l’autre et de la peur de l’échec dans les relations.
Je découvre une grande liberté relationnelle dans mon travail avec les hommes qui partagent ce temps et également auprès des personnes dont j’ai la charge. Et c’est super !
Aujourd’hui, je suis à ma juste place et je ne me sens plus obligé de me justifier, ni à mentir dans mes relations à cause du regard des autres sur ma vie.
Il y a donc tout un processus dans la maturation de mon rapport aux autres, processus durant lequel j’ai appris à sortir du mutisme et à accueillir l’autre dans sa différence. Malgré le désir de vivre sainement des relations avec des hommes, j’ai eu des périodes de recherches effrénées, de besoin d’intimité très forte. Pour me rassurer, pendant les moments de grande fatigue ou de stress, j’avais de nouveau recours à des relations affectives et/ou sexuelles.
Le meilleur moyen de sortir de nos prisons de nos habitudes passées, c’est de les accueillir en vérité, avec beaucoup d’humilité. C’est de reconnaître ce besoin de ne plus souffrir et d’être soulagé d’angoisses quand je tente maladroitement d’y répondre: « J’ai envie, j’ai soif de cela maintenant !!!… »
Est-ce que je peux accepter de me tourner vers Dieu et lui demander son aide à l’endroit même où je me sens démuni, incapable ?
Ai-je vraiment besoin de mon palliatif pour vivre en paix avec moi-même ?
Cette compensation par la dépendance donne une fausse sécurité et c’est en l’affrontant pour ce qu’elle est que nous pouvons grandir. C’est grâce à des amis de confiance et en me relevant autant de fois que cela a été nécessaire que je me suis senti capable d’affronter ma réalité quotidienne.
« Si aujourd’hui, cette semaine, ce mois-ci, j’ai été capable de vivre sans cette compensation, c’est possible pour aujourd’hui, bien que je me sens plus fragile… » Répondre par des compensations éphémères m’a maintenu dans une existence empreinte de tristesse et un sentiment d’échec. Je ne suis pourtant pas rejeté ni par Dieu, ni par mes amis.
Ma joie a pu se déployer à chaque victoire, si petite soit elle, en prenant soin de moi d’une manière plus appropriée, en partageant mes faiblesses avec d’autres. Merci à tous ces amis qui ont su m’encourager au lieu de me condamner. M’aimer, au lieu de me rejeter… Merci !
J’ai eu envie de me sentir mieux et j’avais trouvé une sécurité dans des compensations de toutes sortes ? (sexe, internet, drogue, porno, errance…), mais tout cela ne construit rien de bon. Ce que je retiens de cela, c’est que j’ai cherché des réponses à mon besoin de sécurité, tellement mis à mal. Je repère qu’a travers ces recherches, il existe une série de besoins complètement niés, et qui sont pourtant bien légitimes et réels. Par économie ou par détresse, nous pouvons avoir ce réflexe de nous précipiter dans de l’intimité « bas de gamme », pour oublier, s’étourdir et fuir une trop douloureuse réalité. Ce besoin urgent de sécurité déstabilise, fait peur. Le réflexe est de se protéger de l’effondrement, de la peur de tomber en dépression peut être, en utilisant ce palliatif efficace sur le moment.
Au travers de partages avec des personnes du groupe « Forts dans la Faiblesse », j’ai reconnu beaucoup de mécanismes de ce type. J’ai l’impression que beaucoup d’hommes qui ont du mal à sortir du silence face à leur sentiment de solitude ou face à leurs attraits, se récupèrent comme ils peuvent avec leurs compensations. Déposer ses difficultés devant Dieu, devant d’autres et pouvoir exprimer son incapacité est une aide précieuse pour tous. La faiblesse, les fragilités que je porte ne sont pas des obstacles majeurs à la vie ; Les véritables obstacles demeurent dans l’isolement qui coupe de toutes relations et le découragement qui conduit à la mort si celui-ci n’est pas nommé.
« Je vais m’en sortir tout seul », « je mène ma barque seul ». Accepter la présence et le soutien des autres dans mes difficultés, c’est vivre la dépendance avec les autres et Dieu. Cette dépendance là n’est pas destructrice ou aliénante, mais rédemptrice.
Je découvre combien les autres m’aident et me révèlent que je suis humain, avec toutes mes capacités d’amour, de don aux autres. Je m’appuie sur la présence des autres et de Dieu pour devenir petit à petit responsable de ce que je vis. J’ai peut être été dépossédé de ma vie en croyant que c’est à cause des autres que je me suis enfermé dans une prison… Ce regard est erroné, car même si je subis les conséquences de certaines blessures, je peux résister et refuser de me laisser conditionner dans mes comportements quand je prends conscience que j’ai pu être manipulé ou abusé. Je suis responsable de ma vie et personne d’autre ne répondra à ma place de ce que j’en fais maintenant. Les personnes qui m’ont abusé sont responsables de leurs actes sur ma vie, mais j’ai la responsabilité de ne pas m’enfermer dans leur problématique, en me libérant de cette attache destructrice.
En ce qui concerne l’homosexualité, est-ce que assumer son attirance, c’est obligatoirement y répondre ? Est-ce à l’autre de me donner des limites ou bien à moi de chercher à savoir ce que je veux faire de ma vie et par conséquent d’en devenir responsable ?
Quel est mon désir ? Suis-je en marche pour chercher ce qu’il y a de meilleur pour moi-même ou, suis-je soumis à des pensées obsessionnelles ?
Lors de mon examen personnel de mon attirance, j’ai pu voir que le réseau amico-social est vital. Nous ne sommes pas faits pour vivre seuls, mais bien pour être en relation avec d’autres. Comment trouver un équilibre personnel et relationnel, tout en recevant des autres ce qui me construit en profondeur ?
Je crois que c’est une interaction entre ma relation intime avec Dieu (avec Sa paix qui grandit en moi) et la rencontre avec des hommes et des femmes qui sont dans cette dynamique de la relation vraie et responsable.
Ma vie m’appartient : c’est la seule chose que personne d’autre ne peut porter à ma place. Je suis unique et personne ne peut la prendre. C’est à moi à poser des actes et des les assumer. Même Dieu ne peux pas décider ou choisir à ma place. Je reste totalement libre et responsable…
L’intimité avec Dieu est ce lieu où la rencontre en toute vérité peut se faire, cet espace où mes faiblesses peuvent trouver une force nouvelle, donnée de l’intérieur.
7° Le changement n’est pas centré sur un changement de l’homosexualité vers l’hétérosexualité, mais bien plus sur une redéfinition sur mon identité avec cette question :
Qui suis-je en tant qu’homme ?
Je suis un homme en devenir. Cette évolution englobe tout ce que j’ai reçu et que je continue à recevoir chaque jour. Le changement se situe-t-il dans le fait de ne plus être attiré par les hommes, est-ce devenir parfait, se marier, éprouver des désirs pour des femmes ?
Je crois que ce sont des questions incomplètes. Ce que j’ai tenté d’expliquer au travers de ce message montre une complexité plus grande et surtout une manière différente d’appréhender un changement possible.
Si nous reprenons rapidement ce que j’ai évoqué auparavant, l’attirance sexuelle est conditionnée par l’ensemble d’un parcours personnel…Si je reprends mon histoire, aidé et soutenu dans cette démarche par des personnes de confiance, mon passé blessé prendra une autre dimension et ma vie pourra changer.
En vérité, va-t-il y a voir un changement complet ou partiel par rapport à mon attirance ? Tout dépend de la manière dont ma vie s’est organisée autour de cette attirance et de mon implication personnelle dans des désirs homosensibles.
Les rencontres que nous faisons participent à la formation de nos désirs et cela n’est pas à négliger. Le réseau personnel est important et cela conditionne aussi nos choix. Ce que je mets en place dans ma vie est également facteur de changement. Personnellement, j’ai choisi de faire parti d’un groupe d’hommes non confessionnel, en dehors de la problématique de l’homosexualité pour continuer mon cheminement. Cela est très fructueux, car ma vision des hommes était fausse, aussi bien dans l’idéalisation d’une image d’homme rêvé que dans ma vision de moi-même en tant qu’homme. Je me découvre homme, finalement pas si différent des autres dans leur question, leurs attentes et leurs faiblesses. Et cela est vraiment libérant.
L’objectif d’une relation face à d’autres est d’être vrai. Si j’ai un désir de changement, il ne faut pas l’étouffer, mais il a besoin d’être pris en compte avec sérieux et discernement, dans le contexte dans lequel je vis.
Je crois que j’ai eu beaucoup de mal à vivre mon attirance par le passé et à en sortir, parce que je n’ai pas eu de témoins qui m’aient encouragé. C’est un peu ce que je tente de faire en laissant trace sur le net le récit de mon parcours, parce qu’il est important d’entendre des témoignages de personnes qui confortent le sien ou qui donnent de l’espérance à ceux qui l’ont perdue.
La première espérance que je souhaite à chacun, c’est celle de Dieu, car elle ne déçoit pas.
Si par mes mots j’ai blessé quelqu’un : que cette personne accepte mes excuses. Qu’elle examine dans son cœur ce vers quoi elle se sent appelé dans la vérité et la paix.
« Tu peux avoir ton espérance. Peut être en n’ayant plus d’angoisse ou en sortant de tes obsessions afin de regarder en vérité ce qui se passe, sans fuir… C’est accepter aussi d’être remis en cause sans en être détruit.
Crois-tu que si tu es remis en cause, tu seras détruit ?
Crois-tu que si tu ne t’accroches plus à ces rapports intimes avec les hommes ou à ces attirances, tu seras perdu?... Non tu ne le seras pas.
Tu ne peux pas vivre seul ce cheminement vers plus de vie…
Je t’encourage pour ma part à ne pas rester seul. »
Je conseille le parcours « Torrents de Vie », même s’il ne s’adresse pas exclusivement à des personnes attirées par le même sexe, mais plus largement à des personnes en difficulté affective.
Le désir de changement n’est pas venu pour moi du jour au lendemain. Je suis passé par des phases plus ou moins faciles d’acceptation face au changement : succession de découragements, d’espérance ; succession d’effervescence intérieure, de grands silences… C’est cette voie que j’ai choisie, c’est le chemin qui correspond à ce que je désire profondément.
Je terminerai par cette question :
Que désires-tu pour ta propre vie ?
Etre à l’écoute de son cœur permet d’être en contact avec qui nous sommes.
Le Seigneur n’est pas étranger à nos désirs. Il les entend et il y répond.
Bonne route !
Jean-Marc
Blog/site: http://blogs.aol.fr/jmbpierre/libre
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